LITURGIE du DIMANCHE
commentaire sur la Parole
Ayez
en vous les dispositions |
La
liturgie de la Parole de ce dimanche nous donne la possibilité de goûter
de nouveau l’un des plus beaux textes des Écritures chrétiennes. Nous
pourrions le définir comme un «texte majeur» que nous réentendons chaque
année, le dimanche des Rameaux, au commencement de la Semaine Sainte:
l’hymne au Christ, qui s’est dépouillé pour nous et pour notre salut.
Le mystère de l’abaissement du Christ Seigneur devient le fondement
de notre cheminement baptismal.
...L’exhortation que saint Paul nous adresse: «que chacun de vous, en toute humilité, considère les autres supérieurs à lui-même» (Ph 2,3), résume l’attitude du Verbe qui s’est fait chair «prenant la condition de serviteur, devenant semblable aux hommes» (Ph 2,7). L’Apôtre nous place devant le mystère du Christ et ouvre – mieux, ouvre tout grands – les yeux de notre cœur sur les conséquences du mystère pascal dans notre vie concrète de chaque jour: «pour que ma joie soit complète, ayez les mêmes dispositions, le même amour, recherchez l’unité» (Ph 2,2). …Bien qu’elle arrive dans la suite des lectures de ce dimanche, l’exhortation de Paul nous aide beaucoup à comprendre non seulement les paroles du Seigneur Jésus que nous trouvons dans l’Évangile, mais également celles du prophète Ézéchiel qui en préparent la compréhension profonde et généreuse. L’invitation à l’unité revient souvent dans les exhortations de l’Apôtre, toutefois, elle s’enracine dans un besoin irrépressible au cœur de chacun et trouve aujourd’hui, à travers la révélation de la Parole, son fondement plus profond. Il s’agit du fondement le plus vrai sans lequel chaque effort, même sincère et passionné, risque de tomber dans le vide. Il importe donc de retrouver l’unité de son propre cœur, la réconciliation de ses propres désirs, la mémoire de son propre combat intérieur vers la paix et la vérité qui nous rendent vraiment frères et sœurs de tous, et amis de la partie meilleure de nous-mêmes. …Le Seigneur Jésus pose une question aux chefs des prêtres et aux anciens du peuple et, sous ce symbole, il s’adresse à ce qui, en nous-mêmes, risque d’être cérébral, directif, compromettant, Ainsi, nous demande-t-il de descendre de l’imagination de nos super-idéaux jusqu’à l’acceptation du réel de nous-mêmes qui nous ouvre à l’accueil serein et plein de «compassion» (Ph 2,1) de la fatigue et de la recherche de nos frères. Paul nous pousse à assumer rien de moins que «les sentiments du Christ Jésus» (2,5) et il nous dévoile que la seule manière de le faire ne consiste pas en un idéal élevé et éthéré, même si admirable, mais à se dépouiller de toute prétention imaginative et directive pour assumer la vie avec ses contraintes et ses opportunités. C’est l’unique voie pour se libérer de toute prétention sur les autres, jusqu’à connaître le «privilège» unique (2,6) du Maître que nous voudrions être aussi le nôtre: ressembler tellement au Père des cieux au point d’être reconnus comme ses fils et appelés par tous avec le nom et la réalité de frères. …Le premier pas, sans lequel tout est impossible, c’est sans doute l’accueil du combat intérieur qui nous accompagne dans l’accueil existentiellement et activement de «la volonté du Père» (Mt 21,31). On peut résumer cette volonté en une seule parole qui devient un défi: être, nous sentir et nous comporter en frères. Pour cela, il importe de reconnaître que nous portons en nous une passion qui devient souvent un combat et une contradiction et qui, pourtant, est incapable de nous séparer du projet de Dieu, qui n’exclut personne… même pas «les publicains et les prostituées». À notre manière d’imaginer la réalité comme tendant au négatif, le Seigneur oppose une manière diverse d’être compagnons de route: «Si le méchant se détourne de sa méchanceté pour pratiquer le droit et la justice, il sauvera sa vie» (Ez 18,27). Ce qui fait vivre, c’est l’hypothèse qu’est possible – toujours et malgré tout – un changement et une amélioration pour tous. Alors que le «chef» et le «prêtre» - qui sont en nous – risquent de toujours supposer le pire. …Et le Seigneur Jésus nous porte encore un peu plus au-delà de la parole du prophète Ézéchiel en nous dévoilant davantage le mystère de cette possibilité de réfléchir qui exige du temps et qui peut même paraître – dans un premier temps – exactement le contraire: «Je ne veux pas». Mais, ensuite, s’étant repenti, il y alla» (Mt 21,29). La différence entre les deux frères – semble nous dire le Seigneur Jésus – ne consiste pas à consentir ou moins à la proposition et au commandement de leur père, mais dans l’attitude à réfléchir sur le rapport qui s’instaure entre les paroles exprimées en réaction, et la vie concrète. Le premier fils, qui a une réponse prompte et positive, paraît manquer de capacité de réfléchir, de vérifier, de se regarder intérieurement, pour discerner honnêtement ses «sentiments», pour ne pas se contenter de faire et de se demander le sens de ce qu’il accepte de faire. …Nous sommes ces deux frères! En réalité, nous sommes toujours deux et dans notre cœur, les deux réactions possibles s’affrontent continuellement et justement. En effet, accomplir la «volonté du Père» (Mt 21,31) ne peut et ne doit pas être simplement quelque chose de «naturel» où se manifeste une structure psychologique de «fils condescendant» ou de «fils rebelle». On exige de chacun un peu plus de conscience, de risque et même d’erreur. S’il est vrai que l’homme qui ne se convertit pas à Dieu perd son identité et son humanité; l’homme qui accepte de revenir sur ses pas construit sa personnalité et accroît sa propre humanisation: devant Dieu et pour ses frères. Il y a des règles, même dans la conversion: la fidélité à l’aventure d’un cheminement avec le Seigneur se construit progressivement et pas mécaniquement. Un «oui» est mécanique s’il ne se concrétise pas, de même, un «non» peut sembler un affront et une catastrophe, mais qui, à l’improviste, peut être le début d’une histoire: l’histoire de la conversion! PRIONS Seigneur,
Toi qui vois en chaque homme
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